Échec cuisant de « War of the Worlds » (2025)

Lorsqu’il s’agit d’adapter au cinéma une œuvre emblématique de la science-fiction, les attentes sont naturellement élevées. Les fans du genre espèrent une transposition fidèle, qui respecte l’esprit du récit original tout en y ajoutant une touche d’innovation. Malheureusement, le film « War of the Worlds » (2025), réalisé par Rich Lee avec Ice Cube dans le rôle principal, échoue lamentablement à relever ce défi.
L’histoire chaotique de la production du film est déjà un récit en soi, révélant un projet voué à l’échec dès sa conception. Imaginé en pleine pandémie de COVID-19, à une époque où les protocoles de tournage étaient encore instables, ce « War of the Worlds » est le fruit de l’initiative du producteur russe Timur Bekmambetov, connu pour avoir popularisé le genre « Screen Life », où la narration se déroule à travers des écrans numériques.
Bekmambetov a eu l’idée de faire tourner les acteurs depuis leur domicile, un concept séduisant sur le papier mais désastreux dans la pratique. Le film est resté en développement pendant cinq ans, et Universal a fini par refuser de le distribuer en raison du mécontentement général de l’équipe de production face au résultat final.
Finalement, « War of the Worlds » a été distribué via la plateforme de streaming Prime Video, où il est devenu un exemple à ne pas suivre pour adapter un classique de la science-fiction.
Un usage raté du genre “Screen Life”
L’un des problèmes majeurs du film réside dans son exploitation maladroite du format « Screen Life ». Ce genre, devenu populaire ces dernières années, notamment dans le thriller et l’horreur, repose sur une utilisation inventive des écrans numériques pour faire avancer l’intrigue.
Mais dans « War of the Worlds », les créateurs semblent ignorer les subtilités de cette narration. Plutôt que d’intégrer naturellement les interactions numériques à l’histoire, le réalisateur casse constamment le rythme avec des explications inutiles et des incrustations de texte superflues.
Par exemple, lorsqu’un personnage reçoit un appel de la NASA ou du FBI, le film se sent obligé d’identifier l’appelant de manière explicite, comme si le spectateur était incapable de le comprendre par lui-même. Cette approche infantilisante ruine toute tension dramatique et détruit l’effet immersif que le « Screen Life » est censé procurer.
Le recours excessif à des images d’archives et à des effets visuels mal intégrés ne fait qu’aggraver cette impression d’amateurisme, révélant un manque évident de maîtrise technique de la part du réalisateur.
Résultat : un film décousu, maladroit, et frustrant pour le spectateur, que le réalisateur semble ne pas avoir jugé capable de suivre l’histoire sans être constamment assisté.
Des performances médiocres et des effets peu convaincants
En plus de ses défauts techniques, « War of the Worlds » souffre de performances d’acteurs ternes et d’effets spéciaux peu crédibles. Ice Cube, acteur pourtant talentueux, semble ici en pilotage automatique dans le rôle de Will Radford, analyste en sécurité chargé de contrecarrer l’invasion extraterrestre grâce à ses compétences en surveillance numérique.
Les autres membres du casting ne relèvent pas le niveau : leur jeu est souvent rigide, sans émotion ni conviction. Un problème d’autant plus grave dans un film qui repose sur l’urgence et les liens humains face à une crise mondiale.
Quant aux effets spéciaux, censés être un pilier du film de science-fiction, ils sont décevants. Le budget limité transparaît dans des images pixélisées, mal composées, censées représenter l’invasion alien. Le recours à des séquences d’archives pour illustrer le chaos mondial nuit encore à la crédibilité du film, qui ressemble davantage à un patchwork mal ficelé qu’à une œuvre cinématographique aboutie.
Une occasion manquée de commentaire social
Ce qui rend « La Guerre des Mondes » si pertinent, même aujourd’hui, c’est sa capacité à aborder des thématiques profondes : la technologie, la surveillance gouvernementale, la vulnérabilité de notre civilisation. Malheureusement, l’adaptation de 2025 passe complètement à côté de ces dimensions.
Les tentatives du film pour évoquer ces sujets sont maladroites, voire ridicules. Le fil narratif autour de la vie privée numérique du protagoniste devient un simple prétexte scénaristique, avec pour point culminant la suppression de sa page Facebook… en temps réel.
Plutôt que d’exploiter ce moment pour questionner l’éthique des données personnelles ou les abus technologiques, le film opère un virage absurde vers un placement de produit grossier pour le service de livraison par drone Prime Air d’Amazon. Une trahison complète de l’ambition initiale du projet.
Ce changement de cap trahit l’incompréhension totale du réalisateur quant au message originel de l’œuvre, et souligne à quel point cette adaptation représente une occasion manquée de proposer une réflexion sociale pertinente.
Un avertissement, mais aussi un espoir
Malgré l’échec évident de « War of the Worlds » (2025), tout n’est pas perdu pour autant. Les thèmes du roman original restent puissants et actuels. Avec une équipe créative compétente et respectueuse du matériau d’origine, il est encore possible d’en tirer une adaptation réussie.
Le format « Screen Life », mal utilisé ici, pourrait devenir un atout dans de meilleures mains. Un réalisateur expérimenté pourrait créer une œuvre haletante et immersive, en intégrant intelligemment les écrans numériques à la narration.
Une future adaptation pourrait aussi approfondir les enjeux politiques et sociaux de l’invasion alien : surveillance étatique, dépendance technologique, fragilité de nos sociétés hyperconnectées. En équilibrant ces dimensions avec l’aspect spectaculaire de la science-fiction, un nouveau « War of the Worlds » pourrait enfin faire honneur à l’héritage d’H.G. Wells.
L’échec de 2025 doit servir d’exemple. Il rappelle que même les histoires les plus connues nécessitent une réelle vision artistique et une compréhension fine du genre pour réussir sur grand écran.
Conclusion
En fin de compte, « War of the Worlds » (2025) s’impose comme une leçon de ce qu’il ne faut pas faire lorsqu’on adapte un classique de la science-fiction. Des faiblesses techniques, un jeu d’acteur insipide et des thématiques maltraitées en font une immense déception pour les fans du genre et une tache sur l’héritage de l’œuvre originale.
Mais cet échec ouvre paradoxalement la voie à une rédemption. Avec une meilleure compréhension du format « Screen Life », une approche plus fine des enjeux contemporains et une fidélité assumée à la vision de Wells, un futur film pourrait enfin captiver le public et rendre justice à ce chef-d’œuvre intemporel.
En attendant, cette adaptation de 2025 restera dans les mémoires… comme un avertissement.
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